RALENTIR

Ralentir implique la notion de temporalité.

Dans notre monde actuel, tout semble s’accélérer, en premier lieu le temps. Des études ont démontré, qu’aujourd’hui une journée de 24 heures correspond à 16 heures de temps réel. Ceci proviendrait de l’accélération de la rotation de la terre due à l’élévation de la fréquence vibratoire de celle-ci. Constat mesurable grâce au principe des résonances de Schumann, capable d’enregistrer la pulsation de la terre.

Nous subissons donc cette accélération dans notre espace-temps et notre corps. Notre modernisme, notre capitalisme amènent aussi leurs parts d’activation du temps, avec cette course effrénée : à toujours plus, toujours plus vite… Nos modes et rythmes de vie ont ainsi étés peu à peu contaminés par cette accélération.

C’est une spirale infernale dont il est difficile de se soustraire, à moins d’y être contraint, ou alors, de se responsabiliser en amenant davantage de conscience pour volontairement ralentir.

Ralentir implique déjà de se rendre compte du rythme que notre monde nous impose et que nous nous imposons. S’il nous est guère possible d’agir sur certains paramètres extérieurs, il nous est cependant possible d’avoir une action quant à notre façon de vivre.

« Faire » est une programmation inhérente à ce monde, c’est aussi une racine de survie et de nécessité. Cependant, lorsque « faire » devient le moteur principal de nos vies, sans qu’il y ait de régulateur, il peut y avoir un risque de surchauffe., voire une explosion. Plus la pédale de l’accélérateur est enfoncée plus les risques sont grands !

La fatigue, le mal être, l’épuisement, le burn-out, la dépression, la maladie, les accidents… sont parfois des moyens de nous contraindre au ralentissement, voire à l’arrêt.

Il semble plus judicieux d’anticiper cela, avant d’être contraint et forcé… Apprenons déjà à lever le pied !

Ralentir permet déjà, de mieux percevoir le monde qui nous entoure et notre propre monde. Comment est-il possible de voir la beauté d’une fleur si nous passons à côté en courant ?

Comment savourer une caresse lorsqu’elle glisse sur le corps à la vitesse d’un éclair ?

Comment se délecter d’une fraise lorsqu’elle est engloutie toute ronde ?

Comment se rencontrer lorsque l’on ne prend pas un instant pour plonger dans le regard de l’autre ? 

Comment se sentir vivant si l’on ne s’arrête pas pour entendre les battements de son cœur ?

Comment prendre conscience de la préciosité et de la beauté de la vie si nous la traversons ventre à terre, le regard rivé sur notre montre ?

Si nous regardons la nature comme enseignante des lois universelles, elle peut nous inspirer par le simple rythme de ses saisons, par sa patience œuvrant avec lenteur…

Il y aura toujours de bonnes raisons à s’empresser, à courir, à faire vite, à ne pas prendre le temps de… Sommes-nous donc si pressés d’aller rejoindre nos tombes ou que fuyons-nous?

Même si la plupart d’entre nous aspire à ralentir, il s’avère souvent difficile d’accepter de ne plus être actif et de vouloir faire en permanence.

Le ralentissement, le repos, sont souvent perçus et jugés comme fainéantise ou paresse. La déprogrammation d’une forme de culpabilité à « ne rien faire » s’impose ; tout comme le déconditionnement de certaines valeurs véhiculées depuis fort longtemps.

Lorsque nous avons appris à vivre seulement selon le mode action, le passage au ralentissement n’est, certes, pas évident. Il se peut que nous passions par des phases transitoires d’apathie, d’ennui, de vide ou perte de raison d’être.

Pourtant, en acceptant de laisser faire, de se laisser traverser par ce qui émerge, nous pouvons découvrir certains aspects de nous-même que nous ignorions jusqu’alors. De cet espace parfois inconfortable, peuvent émerger certaines prises de conscience, certaines révélations mais aussi des inspirations, un désir de créer, de nouvelles motivations et orientations…

Ma propre expérience en bateau m’a permis d’aborder le temps différemment.

Voici un extrait de mon journal de bord :

« Prendre le temps, se l’offrir est une base indispensable à tout voyage et surtout pour soi. La notion de temps sur l’eau diffère de celle à terre.

Il n’est plus une contrainte mais devient espace d’évolution.

Nous devenons les passagers du temps, et nous nous soumettons à sa mouvance :

Durant les longues traversées en mer, parfois il s’oublie, se perd, se suspend, ralentit, se dilate, s’immobilise, s’étire, file….

Le tic tac des obligations, du devoir, du faire disparaît. La seule relation avec l’aiguille du temps est liée aux quarts afin que chacun ait son compte de sommeil

L’heure n’est régie que par les paramètres jours et nuits. Un cadran plus large qui laisse place à plus de liberté.

Quelle chance ! Quelle opportunité nous nous offrons d’être là, d’avoir du temps ! Ce temps nous appartient et nous lui appartenons !!!

«  Le temps est l’espace que l’on s’octroie pour réaliser ce qui nous est essentiel ! », comme aimait me le rappeler mon mentor : Jupin.

Le retour à des valeurs et besoins plus simples s’opère naturellement. Le rythme de vie ralentit de lui-même.

Les tentacules de la société de consommation et de ses pressions n’atteignent pas le large. Sur l’eau, pas de tentations, nul besoin d’avoir ou posséder. Une sensation agréable de dépouillement se fait jour. Nos besoins se restreignent tant sur le plan matériel, que mental. Nous libérant ainsi de nos attaches factices.

Il n’y a guère de place à l’ennui, ni au besoin de s’occuper ou de se distraire. Il y a déjà bien assez à faire en navigation : réglage de voile, surveillance, pêche, être présent à ce qui se passe… et découvrir de nouvelles îles, de nouvelles personnes… »-Extrait de mon article voyage autour du monde article du 1er Juin 2013.

Pour ralentir avec justesse, il semble essentiel de prendre en considération nos propres besoins, avant ceux de notre entourage. Sans quoi, nous resterons soumis au rythme des autres et non le nôtre.

Il nous incombe de devenir artiste de notre propre espace-temps : de poser son cadre, de tracer l’esquisse des formes de nos inspirations, de laisser venir les gestes traduisant au mieux ce qui nous définit et ce dont nous avons besoin pour nous exprimer, pour être.

Il nous faut discerner ce qui est juste et approprié à l’élaboration de notre projet ; savoir refuser les teintes et propositions qui ne s’accordent pas à notre dessein. Il nous faut apprendre à reconnaître les limites que nous avons déterminées pour ne pas déborder. Il nous faut aussi veiller à ne pas être dérangé afin de rester concentré sur notre tâche. Ainsi, nous pourrons garder le rythme qui nous convient pour réaliser notre œuvre.

La lenteur amène naturellement plus de conscience qui se déploie encore davantage dans l’immobilité. L’expansion de conscience crée un espace de réajustement et d’émergence d’un fonctionnement différent. De nouvelles perceptions et visions de notre propre monde peuvent apparaître.

Des répercussions qui parfois bouleversent nos conceptions, mais permettent certains réajustements nécessaires et modifications plus ajustées à nos besoins fondamentaux.

S’initier à la lenteur en explorant l’immobilité, peut aussi nous conduire à faire l’expérience de la suspension du temps, voire sa dissolution.

Les bienfaits du ralentissement, du repos conscient, sont nombreux :

-Sur le plan physiologique : ils induisent une stimulation du système parasympathique amenant un état de relaxation naturelle, réduisant ainsi le rythme cardiaque. L’activité respiratoire se ralentit et la tension artérielle diminue. La fonction digestive, le sommeil et la libido sont favorisés.

Une plus grande faculté de récupération se met en place.

Sur le plan psychique : ils permettent de ressentir davantage son corps, son espace intérieur, de se mettre à l’écoute des sensations, perceptions, émotions, de l’état général présent, et de se laisser traverser par tout ce qui est dans l’instant.

La conscience peut explorer de nouveaux états et expérimenter l’ÊTRE dans une dimension plus large.

La réceptivité, l’écoute, la conscience sont ainsi accrues, générant une meilleure connaissance de soi et une meilleure adaptation au monde.

Ce temps pour soi, s’avère précieux pour recharger nos batteries, ainsi sommes-nous plus à même, d’être opérationnel et efficace lorsque le temps de l’action se présente.

Connecté à nos ressentis, nos besoins, à qui nous sommes, nos comportements peuvent s’aligner à l’élan intérieur et non plus à ceux de l’extérieur permettant d’interagir plutôt que réagir !

Cela génère moins de dépendances et contraintes par rapport aux facteurs externes, tout en nous prédisposant à agir positivement et respectueusement pour nous-même et notre entourage. Nous répondons ainsi, aux sollicitations externes de façon plus appropriée.

Nous portons la responsabilité du rythme de notre vie, de ce que nous souhaitons vivre ou non, et sommes libre de ralentir et nous positionner pour occuper notre place légitime.

Sans effort, sans lutte, juste dans ce ralentissement qui s’impose naturellement, nous sommes maîtres à bord de notre propre temps. Il ne tient qu’à nous de le ralentir ou de se syntoniser sur celui qui nous convient.

Ralentir c’est s’offrir un merveilleux voyage vers soi, dans ce temps imparti du premier jour du reste de notre vie.

Sabrina

LE TEMPS VA, ET S’EN VA…

Au cœur de l’hiver, les feuilles ne sont plus que fantômes

Tout disparaît sans laisser de regret de ce qui fût atomes

Balayé par les vents, les gelées porteuses de mémoires

fondent peu à peu dans le linceul blanc et noir

L’univers poursuit son œuvre dans l’alchimie du temps

veillant à libérer l’ancien pour établir un ordre différent

Chaque forme se transforme dans un ballet perpétuel

mouvement nécessaire à la restauration de l’autel

Comme la danse gracieuse du papillon éphémère

qui accueille l’instant de cette grâce porté par l’air

et s’en remet naturellement à la terre pour que le feu

dissolve ses ailes passagères afin de rejoindre les cieux

Nulle perte, nulle tristesse dans le flux de la vie

juste un rythme lent qui respire la magie

un état croissant aspiré dans un rêve immuable

où vogue dieu, le père noël, le marchand de sable

pour que l’enfant garde sa pureté son innocence

et puisse un jour goûter à sa pleine présence

Le manège ne cesse de tourner, pleurs et rires

résonnent comme un appel à se souvenir

que nous sommes là pour s’amuser à grandir

Et c’est là dans ce présent permanent

que tout est, que je suis à chaque instant

Sabrina

«  Le temps n’a qu’une réalité, celle de l’instant. Autrement dit, le temps est une réalité resserrée sur l’instant et suspendue entre deux néants »- Gaston Bachelard

« Si vous courez très vite, cette même vitesse vous intoxique. C’est pourquoi il y a tant de prédilection pour la vitesse. Si vous conduisez une voiture, le mental veut aller de plus en plus vite, cela vous intoxique. La vitesse libère certains produits chimiques dans le corps et dans le sang; c’est pourquoi vous voulez continuer à appuyer sur l’accélérateur. Faites l’expérience de courir vite et observez ce qui se passe; arrive un moment où la vitesse prend le dessus; c’est l’accélération de la vitesse.

C’est tout l’opposé qui se produit si vous ralentissez. Que fait Bouddha sous l’arbre ? Ralentir la vitesse; rien d’autre.

Qu’est-ce que je vous enseigne continuellement ? Ralentir la vitesse.

Arrivez à un point où il n’y a aucune vitesse en vous, personne qui courre; dans ce moment l’état de conscience se manifeste; vous devenez éveillé.
Il y a deux pôles opposés; l’un est la vitesse, alors vous êtes intoxiqué, vous devenez inconscient. L’autre est le point mort; ralenti complètement, totalement, un arrêt absolu; soudainement vous devenez éveillé.
Première Étape: Ralentissez votre vitesse.

Mangez lentement, marchez lentement, parlez lentement, bougez très, très lentement et peu à peu vous découvrirez la beauté de l’inactivité, la beauté de la passivité. Alors vous êtes intoxiqué; vous êtes totalement vigilant et conscient. »- Osho
(Extrait de: Returning to the Source, #7)

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