Du 17 au 28/09/15

Le petit tsunami est passé, finalement, l’annonce de celui-ci nous a davantage impacté que le moment où celui-ci est passé. Nous n’avions que peu de connaissances et informations pour pouvoir se faire une idée de la situation, aussi nos seules références sont celles que la TV diffuse, ou que l’on peut capter au cinéma et du coup les proportions ne sont pas forcément celles de la réalité. Je reconnais que Marco techniquement avait tout à fait raison de vouloir aller au large, là est la bonne solution théorique, mais ma pratique à moi s’est davantage orienté vers la terre. Les gens d’ici eux, semblent habitués à ce phénomène car ce n’est pas leur premier tsunami ! D’où leur attitude Zen plutôt surprenante. Au village où nous sommes certains habitant du bord de l’eau, n’ont même pas regagnés les hauteurs. Il paraît que certains sont inconscients et ne bougent qui si on leur annonce une vague de 20 ou 30 m.

De l’autre côté de l’île au Sud, la vigilance fut plus grande car plus exposée, la population de bord de mer a été hébergée momentanément dans l’école sur les hauteurs. Le mouillage réputé dangereux a été évacué, tous les bateaux (six) ont dû partir au large, certains en panne de moteur on été dû être tractés.Une série de 6-7 vagues sont venues recouvrir la digue et terrain de foot, débordant dans le bas du village. Un Marquisien nous raconte : « Le pire c’est lorsque l’eau se retire car cela fait de gros tourbillons qui emportent tout et le port en réalité un mouillage se retrouve ensuite à sec, c’est pour cela que l’on évacue tous les bateaux. » Il n’y a heureusement, pas eu de dégâts, juste un grand nettoyage du front de mer.

Résultat de recherche d'images pour "Hanaiapa"Voilà bientôt un mois que nous sommes à Hanaiapa, seuls au mouillage. Nous commençons à connaître les gens du village et eux en tout cas, nous connaissent bien, ils sont au courant de tout ce que nous faisons. Ils savent quand nous partons marcher, quand nous allons à la pêche, ou à la ville… C’est autant de l’intérêt que de la curiosité. Aussi lorsque l’on passe on nous demande toujours : « Vous allez où ? Vous avez quoi dans votre sac ? » Le festival des Marquises qui a lieu au mois de Décembre, tous les 4 ans, commence à se préparer. Un événement auquel toute la population participe. La voisine de Lynda, Routy s’occupe de confectionner la décoration et différents objets en vue de cette fête, aussi nous invite-t-elle à participer à ce qu’elle fait. Nous découvrons ainsi l’artisanat local le savoir faire et prenons des cours. Notre dextérité est loin d’égaler celle de Routy qui éclate de rire en voyant nos ouvrages ou s’exclame : «  Ho, c’est vraiment pas joli ce que tu as fait! » Loin de nous vexer sa franchise à toute épreuve nous amuse.

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C’est comme un jour où nous l’invitons, avec Lynda, à bord de notre bateau pour boire un coup.

Très vite, je m’aperçois qu’elle change de couleur et qu’elle transpire à grosses gouttes. Lorsque je leur propose si elles veulent rester manger, Routy répond avec un cri du cœur : –  « Ha non alors !, pas question que je mange sur le bateau, ça bouge trop, je veux rentrer! » J’aime cette spontanéité, parfois elle peut surprendre car elle est assez inhabituelle dans nos pays Européens. Ici, les gens nous livrent facilement des choses intimes, ne s’encombrent pas de formule de politesse, s’exprime sans retenue… De ce fait, cela donne un aspect direct, sincère et vrai aux relations.

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A chaque retour de pêche, les gars s’arrêtent à côté de notre bateau pour parler, raconter leur journée. Il n’y a pas d’empressement à vite rentrer, alors que derrière leur boulot  n’est pas terminé. Les Marquisiens sont travailleurs et loin d’être paresseux. Hommes et femmes commencent leur journée au lever du jour à 5 h. Certains partent faire le copra, d’autre à la pêche, à la chasse, d’autres s’occupent d’entretenir leur terres, leur maison, de ramener de quoi cuisiner, faire de l’artisanat. L’entretien du jardin est l’activité favorite. Il faut avouer que leurs potagers sont beaux, mais ce n’est pas sans raison ; un terrain non entretenu est un nid à moustiques et nonos. Ce sont des personnes actives, mais qui savent aussi, prendre leur temps. Le dimanche est jour de repos total et la nourriture, l’alcool coulent à flot…

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Sachant que nous allons bientôt partir Routy tient à nous préparer un repas pour fêter ça avec Lynda ce dimanche.Spécialement pour nous, elle dégote un chevreau, qui finira accompagné de lait de coco dans nos assiettes avec le traditionnelle Féhi, banane cuite, et uru, le fruit de l’arbre à pin. Nous, les chèvres on préfère les voir cavaler dans les montagnes que dans notre assiette… Marco a eu le malheur de dire qu’il n’en avait jamais goûté, alors Routy voulait nous faire plaisir ! Avant de partir, nous ne manquons pas de passer chez William, un ancien, qui ne cesse depuis des semaines de nous dire chaque jour :

« Si toi partir demain, toi venir auzourd’hui serçer encore bananes. » Il parle mieux le Marquisien que le Français. A chaque fois, il tient à ce que nous prenions un régime de banane.

C’est grâce à lui que notre bateau s’est transformé en bananeraie. Depuis que nous lui avons ramené une bouteille de vin et des cahiers, il ne manque pas de nous fournir en fruit. Nous nous sommes attachés à ce lieu, à ces gens et lever l’ancre nous serre un peu le cœur.De toute façon, l’orientation du vent ne nous laisse guère d’autre choix. Il faut partir…

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Le 22/09

A 04h du matin des milliards d’étoiles viennent nous aider à ouvrir les yeux. Nous devons parcourir 60 miles pour rejoindre Ua Huka. Si nous voulons arriver de jour, mieux vaut partir tôt. De bons alizés gonflent notre grand voile et génois. Côté roulis, nous avons eu un bon entraînement au mouillage, aussi on ne fait plus cas de la houle ! Le vent faiblit, nous obligeant à mettre le moteur afin de conserver le bon timing.

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Les côtes de Ua Huka nous émerveillent : toute la bande proche du littorale est désertique, façon far- Ouest ou Canaries, avec des couleurs hallucinantes, en arrière plan les montagnes sont luxuriantes. A l’approche du mouillage du Sud-Est, nous découvrons deux îles, l’une d’elle est plate, des milliers d’oiseaux y ont élu domicile, c’est devenue une réserve. Ils tourbillonnent au dessus et leurs cris stridents retentissent jusqu’à nos oreilles. C’est là que les habitants de Ua Huka viennent régulièrement ramasser leurs œufs, qui paraît-il sont fameux. L’accès se fait d’une falaise équipée d’une corde.

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Nous jetons l’ancre au pied d’une montagne rousse flamboyante, proche d’une plage.

Le mouillage rock and roll par excellence, nous réserve durant la nuit encore une autre surprise : de fortes rafales descendent avec une extrême violence. Nous sommes cul à la plage à quelques dizaines de mètres où les vagues déferlent. Nous n’avons aucunes marges de sécurité si l’ancre venait à riper, aussi notre esprit reste en alerte et oublie quelque peu le sommeil. Le soleil est levé, un nouveau problème se présente : le débarquement à terre. Marco étudie un bon moment le déferlement, les séries et le meilleur endroit pour atterrir avec notre annexe à rames sur la plage. Cela n’empêche pas une arrivée fracassante où Marco de se fait rouler par une vague, le sac à dos avec ! Nous découvrons un lieu insolite.

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Parachutés brusquement dans une petite vallée verte encadrée d’un désert montagneux, au milieu de chevaux sauvages, chèvres, cochons, de dégradés de couleurs terre, nos yeux ont du mal à faire la mise au point. Sur notre route des citronniers et manguiers à profusion croulant sous le poids des fruits. Nous croisons deux cavaliers. Un homme et un enfant qui se rendent à leur cabane au sommet d’une montagne pour donner à boire à leurs chèvres. Leurs chevaux sont chargés de bidons d’eau. Nous convenons de leur rendre visite dès demain.

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Nous poursuivons notre chemin afin de rejoindre le village de l ‘autre côté de la montagne. Au sommet du col, une vallée verdoyante apparaît en contre bas avec une rivière et des toits.

L’eau fraîche du ruisseau est un véritable délice après ces heures de cagnasse sur notre calebasse. Encore un beau village et de véritables humains! Nous en profitons pour aller jeter un œil au mouillage du coin, mais en voyant les vagues déferler sur le quai et les barques à moteurs danser le houla oup ou la samba, nous sommes rapidement dissuadés d’y venir en bateau.

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Venir à Ua Huka pose toujours problème aux navigateurs car les jours calmes au mouillage n’existent que très rarement. D’un autre côté, c’est peut être ce qui préserve ce lieu de beauté.

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Une sorte de force sauvage se dégage de cette île, peut être est ce dû à cette nature indomptée ?

Nous tombons littéralement sous le charme de cette nature rebelle : où ni poules, chèvres, cochons, chevaux n’ont été vraiment domestiqués, où les oiseaux ont leur royaume…

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Même les arbres fruitiers sont libres de pousser où bon leur semble en dehors de toute clôture. La mer est comme une barrière naturelle, assurant la protection de ce lieu.

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Le 24/09

Nous allons rendre visite aux cavaliers rencontrés hier. Après avoir traversé la vallée, le chemin escarpé sillonne sur une montagne très raide. Au sommet, le décors nous laisse bouche bée : vue sur la baie où nous sommes mouillés, avec les montagnes rouges, l’oasis vert formé par la petite vallée, la mer bleuté, les îles au loin… WAOUUU ! Sublime…

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Nous retrouvons plus haut, nos cavaliers à leur cabane au bout du monde. Seules les chèvres et un cousin qui reste en permanence sur ce lieu pour surveiller le troupeau leur tiennent compagnie. Un des problèmes pour le troupeau est le manque d’eau, l’autre les attaques les fourmis rouges. Elles ont envahi les terres et font des ravages : elles mangent les yeux des bébés chevreaux ! Les bêtes sont donc soignées et mises dans un enclot et traitées contre les insectes le soir. Les deux hommes portent des tatouages marquisiens remarquables.

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J’ose leur demander si je peux les prendre en photo. Les tatouages, ici, sont de véritables ornements, un art, mais aussi une histoire. Dans ce contexte, ils apparaissent comme une marque propre à leur culture. Ces tatouages leur confère une distinction ; des dessins symboliques sont choisis en fonction du caractère de la personne et de ce qu’elle a accomplie, de ce qu’elle est.

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Certains Marquisiens sont très impressionnants, je ne sais si leurs tatouages y sont pour quelque chose, ou si c’est leur personne digne et fière. Ils ont gardé une apparence de guerrier qui peut parfois intimider. Cependant dès que l’on fait connaissance, leur gros coeur transpire. Les Marquisiens sont des chasseurs, tout autant que pêcheurs. La chasse se pratique parfois au fusil, mais bien souvent, n’ayant pas d’arme à feu, ils utilisent les chiens et un simple couteau. On peut facilement imaginer que pour attraper une chèvre ou un cochon sauvage, il faut savoir courir et avoir une bonne maîtrise du couteau …

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Aujourd’hui nous partons marcher au grand cratère. Un cercle de montagnes tient en son cœur d’immenses champs parsemés de cailloux où se trouvent des hordes de chevaux sauvages et de taureaux.

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L’herbe sèche a pris une couleur jaune paille, ce qui donne un contraste saisissant avec les roches noires, les montagnes aux teintes brun rouges…

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Le décor est éblouissant, une fois de plus. C’est un plaisir de voir ces bêtes en liberté, courir la crinière au vent. Un peu moins lorsque les taureaux nerveux s’approchent de nous !

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Le 26/09

Le vent ne va pas tarder à tourner au Sud-Est et la houle se renforcer, ce qui n’est pas bon pour nous. La houle est déjà conséquente, alors que c’est soit disant calme, cela laisse imaginer la suite. Les missions pour aller à terre et revenir au bateau en annexe sont à chaque fois périlleuses ! Malgré une observation attentive, il arrive qu’une vague  nous surprenne et s’occupe de notre cas, ainsi que celui de nos sacs à dos. Surfer avec cet engin gonflable n’est pas très approprié, pourtant nous le testons en avant, en arrière, rempli d’eau, à l’envers… Nous sommes chanceux d’avoir pu profiter quelques jours de cette île merveilleuse d’ Ua Huka.

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Nous mettons cap au lever du jour sur Ua Pou. A peine avons nous fini de hisser les voiles, qu’un énorme Thazard vient mordre à notre ligne de traîne.

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Il fait un peu plus d’un mètre, les repas sont assurés pour plusieurs jours. L’alizé est doux et pour une fois ça ne secoue pas trop ! Une navigation comme on les aime, si rare… En fin d’après midi les pitons d’Ua Pou apparaissent en crevant les nuages. Nous regagnons le mouillage du Nord-Ouest à leurs pieds.

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