De Culatra à Madère (Porto Santo) du 29 Juillet au 02 Aout 2012

Le 29/07

Nous faisons un chek météo à la zone wi-fi du village (4 bancs sur la plage avec une bâche tendue au dessus et les gamins du quartier branchés sur leur ordinateur. Ils braillent, piaillent et crient, excités par leurs jeux!!!) Nous, nous tentons de nous concentrer sur nos mails et météo. « – Demain les conditions paraissent top pour aller à Madère!!! s’exclame Marco

Effectivement les Alizés au passage du cap Saint Vincent s’annoncent pas trop fort ce Lundi.

Si non il nous faudra attendre encore une semaine, voire davantage!!! Nous regagnons le bateau en annexe en réfléchissant à ce départ. Nous n’avons pas fait le plein de gazoil, pas de ravitaillement et c’est Dimanche.

« – On pourrait essayer d’aller à la ville de Olhao en annexe avec les bidons? vu que c’est marée descendante, je doute que l’on puisse y aller avec le bateau! »

La ville est un peu loin, mais bon!!

Après une virée à la ville , chargés de nos bidons pleins, du ravitaillement et de l’eau nous repartons avec le moteur qui peine. Le décors entre temps a complètement changé, la marée a découvert la lagune et il n’y a plus d’eau!!!

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« – Ben merde! Comment va-t-on faire pour rentrer? »

On tente de prendre un petit canal matérialisé par des bambous plantés. Ca passe de justesse, mais très vite nous nous retrouvons dans 10 cm d’eau et l’annexe racle le fond. Nous ne nous décourageons pas et tirons, poussons comme des ânes notre chargement!!! Nos efforts sont malgré tout récompensés, nous regagnons après …un certain temps notre bateau!!

Nous le préparons en vue de la traversée.

Le 30/07

Réveil 6h, nous quittons avec le soleil levant cet endroit charmant! Quelques heures de moteur et nous pouvons hisser à nouveau les voiles et retrouver le plaisir de la glisse!!!

« – Oh regarde!!! »

La mer n’est qu’écume tout autours.

Des colonies de dauphins affamés sautent dans tout les sens. Ils chassent. Nous regardons passer ce train ininterrompu de gloutons qui remontent en sens inverse. Je n’en ais jamais vu autant! Peut être des milliers?

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Le vent forcit peu à peu, et la houle avec. Nous commençons à réduire les voilures pour se retrouver très vite avec le minimum: Prise de deux ris à la grand voile et tourmentin à l’avant!!!

Le passage du Cap Saint Vincent n’est pas loin, nous supposons que c’est pour cette raison que ça prend des tours. Evidemment, nous sommes dans les routes des cargos, sur les quels on a intérêt à avoir un oeil!! Le vent n’a pas l’orientation prédite (ni la force d’ailleurs, plus que prévu) et nous sommes obligés de tirer un bord de près avec la houle de travers ça commence à secouer pour de bon! Nous filons entre 7 et 8 noeuds à fond la caisse!!! Le bateau est à la gîte complet et secoué violemment. Tout déplacement s’avère périlleux. Nous nous retrouvons parfois projeté en avant ou de côtés, avec arrêt brutal dans ce qui peut nous arrêter. Gilet de sauvetage et longe sont nos gardiens extérieurs. Je prends le premier quart avec l’estomac noué en regardant les masses sombres s’agiter autours de moi et la puissance du vent Portugais. Dans la nuit je commence à percevoir de l’écume blanche au sommet des vagues!! certaines déferlent. Mon estomac se resserre un peu plus. Soudain l’une d’elle s’abat de toute sa hauteur sur le travers du bateau et passe par dessus. Le choc est vraiment impressionnant, il nous fait tressaillir et le bateau avec. Le stock de bouteilles en verre se trouve projeté dans le carré que je croyais portant avoir bien calées, les placards s’ouvrent et déversent leur contenu…. Par chance rien de cassé!!! Je finis mon quart accrochée au harnais avec les chocottes d’une nouvelle attaque de vague!!! J’en oublie presque un cargos qui fait route sur nous, il se dévie gentillement au dernier moment, ce conno!!! Mais qu’est ce que ça doit être quand c’est la vraie tempête!!! je n’ose même pas y penser… Comment faisaient les anciens navigateurs sans pilote automatique, sans gps et tout le confort que nous avons? Comment font ces nouveaux navigateurs pour affronter le cap Horn et tempêtes au quotidien?

Comment font les personnes qui naviguent en solitaire?

Comment font ces personnes âgées que nous rencontrons sur notre route?( Déjà physiquement c’est épuisant! aller au pied de mât avec vent et houle, une véritable acrobatie! Ne pas dormir plusieurs jours durant!

J’admire!!!

De KERSAUSON dit: » Prendre la mer, c’est tout sauf une fuite, c’est au contraire une discipline et une contrainte. Décider d’aller chevaucher les vagues, c’est une conquête et, pour conquérir, il faut partir… »

Le 31/07

On a parcouru 130 miles en 24 heures, notre records ( en sachant qu’en plus le matin nous nous sommes traînés)

Notre allure passe à présent au portant, la navigation est plus confortable. Vent et houle sont un peu tombés, nous pouvons récupérer.

Dans l’après midi la vis reliant le pilote automatique à la barre pète. Il faut avouer que la veille le pilote a été soumis à rude épreuve pour maintenir le cap au près. Heureusement que cela arrive maintenant et non cette nuit!!! Marco arrive à réparer avec les moyens du bord, mais le bruit du pilote à présent nous inquiète quelque peu!!! Il semblerait que le bras se soit voilé avec la pression exercée.

Le 01/07

Le vent a repris et garde son intensité par chance il reste stable. Le régime houle, nous est à présent familier. Le corps s’habitue à être balloté. Pour dormir (quand on y arrive!!) on se cale avec des coussins des deux côtés du corps. Pour ma part, le stress me prive de sommeil depuis plus de 48h. Je suis pourtant super fatiguée mais mon esprit reste en alerte.

Dans la nuit, on entend un craak! Marco sort et annonce:

« Ben voilà! La pièce métallique qui tenait le pilote est cassée! »

« Quoi? C’est pas vrai? »

Je prends la barre à deux mains pour maintenir le cap. Le bateau à chaque rafale part au lof se retrouve travers à la houle et pour le redresser il faut une force de titan. Là,franchement je me vois mal devoir barrer dans ces conditions durant plus de deux jours! Faudrait que je me mette à la musculation intensive, mais là j’ai pas le temps!! Déjà au bout d’une heure j’ai mal dans tous les muscles des bras, du dos… Marco pendant ce temps tente de nous épargner l’enfer en cogitant. A la lueur de la frontale, il tape sur le petit bout restant de la pièce, il la tord, il la perce… tout ça dans le noir et balloté.

Le premier essaie est infructueux la pièce se tord avec la force du pilote, mais là encore il me surprend car le deuxième essai est le bon!! Tout au moins pour le moment ça tient!!!

Là je suis admirative!!! Bon choix sur le type! Ingénieux, courageux, fort!!!

Qu’est ce qu’on va vite!! Nous filons entre 6 et 8 noeuds. C’est agréable un vent régulier et nous parcourons beaucoup de distance: 137 miles en 24 heures aujourd’hui.

Le 02/07

Nous venons d’établir notre record du monde personnel: 152 miles en 24 heures! hé hé on a pas chaumé! Y marche bien notre TIDOUDOU, y a pas à dire c’est un super bateau!!! Nous cheminons à bonne allure, le sommeil revient tout va. Ces alizés Portugais ont l’avantage d’être établis aussi aucune manoeuvre n’est nécessaire. Ils ne descendent pas en dessous de 18 noeuds.

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C’est lorsque l’on commence à être rodés que l’on s’arrête!! Porto Santo n’est plus très loin… Les côtes apparaissent, nous sommes contents d’arriver de pouvoir retrouver le calme. Enfin presque car le petit port malgré le fait qu’il soit derrière des montagnes reçoit les vents qui descendent. A 20h pour accoster des rafales de 28 noeuds nous accueillent. Cela complique ma manoeuvre et fait réapparaître mon anxiété!!! Dans la nuit je me lève à plusieurs reprises pour retendre les amarres, mais on est heureux de pouvoir dormir pour de vrai!

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Nous voilà ici pour quelque temps. Nous envisageons quelques randonnées à pied sur les îles. Nous devons également trouver quelqu’un capable de réparer le pilote et fabriquer des pièces inox pour les fixations. Nous pensons investir dans un pilote à vent car celui que nous avons ne nous paraît pas fiable pour de longues traversées et lorsqu’il y a des forts vents! Nous étions déjà venu à Porto Santo il y a deux ans lors d’un convoyage. C’est ici même que ma décision de parcourir le monde en bateau est né et je ne le regrette pas!!

Si certains moments sont difficiles, la liberté, l’expérience, la découverte que cela nous offrent valent largement ces peines!!!

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